Une anthropologie impliquée pour améliorer les soins aux nouveau-nés au Cameroun

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Ces dernières décennies, le système de santé camerounais a fondé ses grandes orientations stratégiques, en matière de santé néonatale, principalement sur les analyses quantitatives globales du type Enquête démographique et de santé (EDS), Enquête par grappes à indicateurs multiples (MICS) et Enquête relative aux Soins obstétricaux et néonataux d’urgence (SONU), mettant moins d’emphase sur les approches qualitatives plus locales. Ces études quantitatives ont pu révéler des déficits liés à l’offre de services, notamment aux infrastructures, équipements et ressources humaines en quantité et en qualité. Elles ont également montré une faible utilisation des services disponibles.

Toutefois, ces études ne précisent pas les causes contextuelles et dissimulées de ces couvertures insuffisantes. Dans ce contexte, il est à noter que la prise en compte spécifique de la santé néonatale par les stratégies du ministère de la santé publique est assez récente. En effet, jusqu’au début des années 2010, la santé néonatale était noyée dans des stratégies plus larges de santé de reproduction, maternelle et infantile. C’est notamment grâce à l’introduction des plans opérationnels de la santé néonatale (Every new born action plan), en 2014-2015, que la santé néonatale est désormais considérée dans le cadre d’une stratégie focalisée sur les soins du nouveau-né . Ce contexte contribue à expliquer que le taux de mortalité néonatale est toujours élevé au Cameroun, malgré une légère baisse de 31 à 28 décès pour 1 000 naissances vivantes entre 2011 et 2014.

Appuyé dans cette démarche par l’Unicef, le ministère de la santé publique a cherché à comprendre plus finement les raisons de cette mortalité néonatale élevée. C’est dans cette perspective qu’une étude anthropologique sur les soins prodigués aux nouveau-nés, en maternité et à domicile, a été réalisée. Cette étude, dans la dynamique de travaux similaires réalisés dans cinq pays d’Afrique de l’Ouest, visait précisément à comprendre comment des conditions sanitaires disparates se conjuguent à divers environnements sociaux et familiaux pour construire le risque de mortalité néonatale. Ce faisant, il a été question, dans un premier temps, de décrire les soins effectivement prodigués aux nouveau-nés dans les hôpitaux des différentes régions et lors des accouchements à domicile ; ensuite, de comprendre les pratiques de soins à domicile et les recours aux soins ; enfin, d’analyser les statuts et les représentations du nouveau-né qui interfèrent dans les soins prodigués. Concomitamment à la réalisation de cette étude, un processus d’appropriation des résultats a été initié.

Ainsi, cet article rend compte d’une anthropologie impliquée dans un processus de changements tant au niveau périphérique qu’au niveau central de la pyramide sanitaire. Cette anthropologie impliquée se fonde sur l’engagement de l’anthropologue en faveur de l’amélioration de la qualité des soins néonatals, à travers une approche qui implique dans la recherche, de l’élaboration du protocole de recherche à la « restitution » des résultats, les principaux acteurs concernées par la problématique investiguée, en vue d’inciter au changement.


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